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2013/09/03

Contribution au débat national sur la Syrie

Depuis le 21 Août, les évènements s'accélèrent autour de la crise Syrienne.

Il est fort possible que cette pression retombe après le G20 en fin de semaine, ce qui représenterait d'ailleurs un moyen diplomatique puissant pour bouleverser le programme de cette rencontre au plus haut niveau, la toute première du genre organisée hors d'un territoire controlé par un pays de l'OTAN ou dans la sphère d'influence immédiate des USA. Ce programme prévoyait de mettre enfin au centre de la table le problème le plus crucial de notre temps, celui de la modification en profondeur du système monétaire international (en commençant par de nouvelles modifications des droits de vote au FMI). La prochaine fenêtre d'opportunité après Moscou n'est pas encore connue, puisqu'en 2014 c'est l'Australie qui organisera la réunion. 

Cependant je pense nécessaire, en plus de demander un débat public sur les fameuses preuves qui accableraient nous dit-on le régime de Bachar el-Assad, de contribuer sans plus attendre à ce débat.

Il s'agit d'abord de replacer la raison, et non pas la raison d'Etat, au centre. Il s'agit de mériter notre liberté, en luttant chaque fois qu'elle pourrait être rognée. Comme nous l'a dit Thomas Jefferson: "Si une nation  civilisée s'attend à pouvoir être ignorante et libre à la fois, elle s'attend à quelque chose qui n'a jamais existé et qui n'existera jamais."

1/ Sur le constat d'utilisation des armes chimiques
Ce constat est en train d'être effectué par des inspecteurs de l'ONU. Leur rapport complet, incluant toutes les pièces médico-légales, devrait être immédiatement rendu public. Publier une synthèse est notoirement insuffisant, depuis que l'on sait que ces inspecteurs peuvent ceder à de très fortes pressions de la part de l'ONU, comme le relate l'ancien inspecteur de l'ONU Scott Ritter dans son livre.

2/ Sur les moyens nécessaires à l'emploi d'armes chimiques le 21 Août
Le récent document déclassifié par la France décrit en synthèse ces moyens utilisables par le gouvernement Syrien. Il est insuffisant. En particulier il ne décrit pas les moyens effectivement utilisés le 21 Août, en commencant par les vecteurs (quel est l'intérêt de mentionner les SCUDs si ceux-ci n'ont pas été utilisés?). Il mentionne également en conclusion:
"Nous estimons enfin que l’opposition syrienne n’a pas les capacités de conduire une opération d’une telle ampleur avec des agents chimiques. Aucun groupe appartenant à l'insurrection syrienne ne détient, à ce stade, la capacité de stocker et d'utiliser ces agents, a fortiori dans une proportion similaire à celle employée dans la nuit du 21 août 2013 à Damas. Ces groupes n’ont ni l’expérience ni le savoir-faire pour les mettre en œuvre, en particulier par des vecteurs tels que ceux utilisés lors de l’attaque du 21 août."
Et qu'en est-il d'estimer cette capacité pour des groupes n'appartenant ni à l'authentique insurrection syrienne, ni au gouvernement syrien, et dont on sait qu'ils sont actifs sur le territoire? Pourquoi limiter la recherche de coupables à deux parties seulement ?

3/ Sur le mobile d'utilisation des armes chimiques
Le même document se limite à nous dire:
"il est clair, à l’étude des points d’application de l’attaque, que nul autre que le régime ne pouvait s’en prendre ainsi à des positions stratégiques pour l’opposition."
Et qu'en est-il si l'opposition ou un autre groupe avaient décidés de sacrifier la population et ces positions pour justement provoquer des retorsions gravissimes sur le gouvernement syrien? Qu'en est-il si les armes conventionnelles avaient été bien utilisées par le gouvernement syrien, et les armes chimiques par d'autres groupes sur les mêmes cibles? En plus de simples présomptions ou de la présence d'un mobile, quelles preuves avons-nous que les armes chimiques ont bien été utilisées par ceux rapidement dénoncés des gouvernements français et américains, et par nul autre? 
Tous les groupes présents en Syrie ayant des mobiles suffisants pour utiliser ces armes, l'existence d'un mobile ne peut constituer une preuve, même indirecte.

4/ Sur la défense du droit international, la coalition et les moyens de réponse envisagés
Comment le gouvernement français actuel peut-il envisager un instant de participer à une coalition au côté des Etats-Unis, sachant les crimes commis par le gouvernement et les moyens armés de ce pays en particulier au Moyen-Orient et encore impunis, et sans les dénoncer avec autant de vigueur que ceux reprochés au gouvernement Syrien? Comment politiquement cette coalition ne serait-elle pas un aveu de partager les mêmes vues, sinon pire: les mêmes valeurs?

Comment peut-on imaginer vouloir défendre le droit international comme le déclare Mr Ayrault, et s'associer avec le pays qui le viole le plus systématiquement sans subir de retorsions, en particulier depuis le parjure de Colin Powell à l'ONU et l'attaque injustifiée de l'Irak, et l'emploi en Irak de bombes au phosphore et d'armes à l'uranium, qui sont aussi des armes interdites par le droit international? 

Pourquoi, si le gouvernement français est si sûr de la culpabilité du gouvernement syrien, ne pas monter une coalition avec la Russie par exemple pour apporter "une réponse proportionnée sans renverser le régime de Bachar el-Assad" comme l'a déclaré le gouvernement français? 

Comment imaginer qu'après la Libye et l'Iraq un bombardement par des missiles de croisière (ouvertement annoncé par les Etats-Unis, qui mentionnent même le chiffre de 200 missiles) constitue cette "réponse proportionnée sans renverser le régime de Bachar el-Assad"?

Comment imaginer "empécher le régime syrien de toute nouvelle utilisation d'armes chimiques" (je cite) sans détruire l'intégralité de son stock, et donc sans associer nécessairement des bombardements avec une occupation au sol de longue durée, comme en Irak? 

En tant que citoyen français, j'attends des réponses à toutes ces questions, et j'attends surtout de mon gouvernement qu'il en partage de solides, afin que notre nation prouve encore qu'elle est libre.



2013/08/29

Les banquiers centraux et leurs émotions

[MAJ le 30/08]

Le Financial Times vient de publier un article que j'attendais depuis 2007: Central bankers have given up on fixing global finance. Vous avez bien compris: les banquiers centraux réunis à Jackson Hole renoncent à trouver une solution pour améliorer le système monétaire international et sortir de la crise globale: c'est l'abandon au statu quo.

Bien sur, même maintenir ce statu quo leur est impossible. C'est juste un aveu de leur perte totale de contrôle, ce que nous décrivons depuis des années.
Mais commençons tout d'abord notre analyse par la partie facile: ce renoncement est une émotion qui s'inscrit dans le cadre de l'acceptation du changement induit par la crise systémique globale, et son choc depuis 2007. Les banquiers centraux(*) sont passés par les émotions classiquement associées aux étapes de la courbe du changement de Kübler-Ross qu'elle a appliquée à toute forme de perte catastrophique. 

Immédiatement après le choc, l'étape de déni est celle où continue de s'exprimer le sentiment de stabilité: les banquiers centraux sont dans un état stable, ils maitrisent généralement leur travail, possèdent des habitudes, mais surtout une expertise dans ce qu’il fait. On annonce que la crise n'existe pas, ou bien qu'elle ne sera que très passagère.

Puis vient la confusion : le changement se précise, les faillites se font retentissantes (2008). Les banquiers centraux restent droits dans leurs bottes à ce stade, et ne croient pas encore au caractère systémique de la crise. On communique pour essayer de se convaincre soi-même d'un découplage des économies.

Puis vient le rejet : les banquiers centraux essayent systématiquement de défendre l’ancienne façon de faire (QE) et rejette les nouvelles idées (comme rebâtir le système monétaire international sur un panier de devises, ce qui a été proposé dès 2009).

Puis vient l’agressivité : passant par un sentiment d’amertume, et parfois de colère, les banquiers centraux peuvent devenir agressifs et prendre des décisions contraires à l'intérêt des autres. C'est la phase de guerre monétaire (currency war) depuis 2010.

Puis vient la négociation : les banquiers centraux tentent de négocier pour minimiser les impacts sur leur situation actuelle. C'est le travail de réflexion multilatérale sur la refonte du système monétaire international qui connait son point culminant en 2011. On pourra consulter :
Puis vient l'acceptation de l'échec : les banquiers centraux passent par un sentiment de frustration ou de tristesse, puisque la négociation ne donne pas de résultats. Le bilan de la réunion de Jackson Hole cette semaine en est un très bon exemple. 
On doit ici citer le dernier communiqué du FMI du 5 Août sur la modification des droits de vote et des quotas. L'application de toute la réforme de 2010 est désormais suspendue à la seule décision des Etats-Unis. En effet, un minimum de 85% des votes doivent l'entériner. 75% sont déjà réunis, et les U.S. refusent toujours de voter alors qu'ils sont les seuls à disposer d'un vote bloquant (16%). Comme le résume parfaitement Thomas Bernes :
"The failure by the Unites States to deliver on its agreement after almost three years, seriously weakens the credibility of the Unites States to exercise leadership in the future, and leaves the IMF in limbo on its resources and governance reforms."
Cette acceptation de l'échec peut présenter plusieurs facettes: une pour la communication officielle, comme à Jackson Hole, et l'autre pour des dernières actions résiduelles d’agressivité, menées sans y croire vraiment, comme la remontée des taux et le rapatriement de capitaux de tous les pays émergents vers les U.S. et menaceraient de les faire s'écrouler, à en croire certains commentateurs. La belle blague. Non seulement cette pauvre stratégie n'a eu aucun succès contre la seule zone euro, et là il s'agirait de s'attaquer à tous les autres pays à la fois, alors qu'un fonds de réserve commun de 100 milliards de dollar est déjà en préparation entre les BRICS depuis le début de l'année, lesquels avaient justement anticipés cette possibilité? La suite est parfaitement prévisible: cette campagne anti-BRICS fera rapidement long feu et va accélérer encore la dynamique intra-BRICS. Il s'agit donc en ce moment pour l'Europe, et l'Euroland en particulier, de faire comprendre aux BRICS que nous les aiderons à passer ce moment, tout comme ils nous ont aidé à passer la crise de l'euro. C'est aussi comme cela que les partenariats stratégiques prennent corps.

Puis vient pour nos banquiers centraux la phase de test : les plus progressistes essayent tour à tour de nouvelles solutions de façon limitée, ou sans concertation générale. La dislocation amorcée par la phase d'agressivité s'amplifie. Les actions s’égrènent suivant le moment où chaque banque centrale est entrée dans cette phase. C'est ainsi que se développent les accords de swaps bilatéraux, les fonds de réserve de devises comme celui annoncé par les BRICS en mars dernier, le rachat d'or par certaines banques (Russie, Chine...) et son leasing par d'autres (Inde). Ou encore l'annonce par Poutine de vouloir modifier (cette fois-ci considérablement) le mode de calcul des quotas au FMI lors du prochain G20. C'est pour être synchrone avec ce moment que j'ai proposé dernièrement l'Initiative Multipolaire de Résilience Stratégique. 

Puis viendra ensuite la phase d’acceptation du changement par les banquiers centraux, mais ils en auront encore une perception négative ou de regret de "l'ancien temps". 

Puis viendra enfin la phase d’engagement : les banquiers centraux percevront les avantages du changement, et agiront positivement.


Explorons maintenant la partie plus délicate de notre analyse: celle des chemins politiques alternatifs.

L'empreinte des banquiers centraux dans le champ social n'est pas n'importe laquelle. Depuis un siècle exactement, elle est associée à des mécanismes de plus en plus renforcés de communication, qui ont comme fonction première de synchroniser les émotions du public avec celles des messages qui sont diffusés. C'est là que réside une faiblesse que certains peuvent exploiter à leur avantage. Si le public tombe lui aussi dans cet état de renoncement face aux difficultés de cette crise, on peut alors facilement lui faire avaler de belles couleuvres. 
Relisez l'article du FT et notez la phrase "The choice is this: impose capital controls or let the Fed run your economy." Ce qui veut dire en clair: renoncez à la globalisation financière ou bien concentrez toutes les décisions économiques et monétaires globales dans les mains de la Fed. Cette faiblesse humaine de croire facilement à la concentration des pouvoirs comme solution magique à toute crise, au leadership proclamé et à la simplification évidente du processus de décision comme préalable à toute bonne décision a été exploitée maintes fois dans l'histoire. Hélas, c'est un gouffre qui sépare une bonne décision et une décision pour le bien de tous. A retenir donc: à partir de maintenant et plus que jamais, prêter particulièrement attention aux conséquences politiques possibles de toute expérimentation diligentée dans l'urgence pour répondre à la crise "après avoir tout essayé".

Mais l'article du FT contient une autre perle: "A stable international financial system has eluded the world since the end of the gold standard. The first condition for creating one, however, is the ambition to try."
La toute dernière phrase est particulièrement ambiguë, et je vous propose de la comprendre comme suit: Le monde n'a plus connu un système monétaire international stable depuis la fin du standard or. La première condition pour créer un standard or, cependant, est l'ambition d'essayer.

Dans les prochains articles, je montrerai comment un nouveau standard or associé impérativement à d'autres conditions précises est la meilleure réponse possible à la crise systémique globale. Je m'appuierai pour cela sur les travaux de la Nouvelle Ecole Autrichienne d'Economie (NASOE) et du professeur Fekete en particulier. En effet, puisque les banquiers centraux sont découragés, et les institutions de Brettons Woods en panne, c'est la fenêtre d'opportunité tant attendue pour faire percer cette riche idée: phase de test, d'acceptation et d'engagement :)  Nous tiendrons également compte du caractère multipolaire du monde actuel.



(*) : le terme "banquiers centraux" est simplificateur et désigne ici la somme des influences prépondérantes qui s’exercent pour les décisions structurant le système financier et monétaire international. Il ne recouvre pas nécessairement et pas seulement tous les gouverneurs des banques centrales du monde.

2013/08/21

How long does it take to regulate the derivatives markets ?

Selected excerpts from the recent BIS report "Authorities’ access to trade repository data":

"The recent financial crisis highlighted a severe lack of transparency in the over-the-counter derivatives markets. The lack of available data during the crisis hindered authorities in effectively carrying out their mandates. It also interfered with the assessment of risks resulting from the build-up of unsustainable exposures, which ultimately led to the collapse or near-collapse of some major financial institutions. Increased transparency may improve the stability of these markets by enhancing the ability of authorities to monitor and detect risks.

In September 2009, the G20 Leaders made a number of commitments regarding the operation of over-the-counter derivatives (OTCD) markets, including the statement that all OTCD contracts should be reported to trade repositories (TRs) in order to improve transparency, mitigate systemic risk and protect against market abuse in the OTC derivatives markets.

A significant amount of attention has been focused on addressing 21 recommendations developed by the Financial Stability Board (FSB) to implement the G20 Leaders statements with respect to OTCD markets, as set forth in its report Implementing OTC derivatives market reforms (October 2010).

In October 2011, the FSB advocated that the Committee on Payment and Settlement Systems (CPSS) and the International Organization of Securities Commissions (IOSCO), in co-ordination with relevant authorities, take forward the work on authorities’ access to TR data.

Legislative and regulatory efforts are underway to implement in the G20 jurisdictions the commitment to report OTCD transactions to TRs.

[After several years spent to define functional requirements, the framework and guidelines outlined in the new report "Authorities’ access to trade repository data" released this month] should provide useful guidance in making and responding to such requests and the implementation of data access policies by TRs.

Addressees and scope 
The guidance set out in this report is addressed to both authorities and TRs. The report is addressed to authorities to encourage a common understanding within the official sector and facilitate mutual support of authorities’ respective access needs in support of the expectations set out by the CPSS-IOSCO PFMI; for TRs, it provides guidance on the implementation. 

This report describes the expected data access needs of authorities using a functional approach complemented by an illustrative data access mapping that aligns each function to the minimum level of access authorities would typically require in support of their mandates and responsibilities.

Limitations
It is likely that OTCD data will be held in multiple TRs, requiring some form of aggregation of data to get a comprehensive and accurate view of the OTC derivatives market and activity globally. With the current structure of TRs, no authority will be able to examine the entire global network of OTCD data at a detailed level.

In the light of this limitation, the public sector may wish to consider and further investigate the opportunity and feasibility for a centralised or other mechanism to produce and share global aggregated data, as a complement to the direct access by the different authorities to TR-held data. Outlining such an arrangement is beyond the scope of this report but will be addressed by a feasibility study mandated by the FSB on approaches to aggregate OTC derivatives data."
_______________

I also note that no timeframe for implementing TRs is given in this report. For instance, Banque de France for the moment only draw attention of markets participants.

EU has published a regulation on this topic July 2012. You can read:

Article 91: Entry into force
This Regulation shall enter into force on the twentieth day following that of its publication in the Official Journal of the European Union [27 July 2012].
This Regulation shall be binding in its entirety and directly applicable in all Member States.

And during that time: